Les opposants au salaire minimum font fausse route

tous profiteront de l’augmentation
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April 23, 2010

Récemment, le Sun de Brandon publiait un article et deux éditoriaux en réaction à l’annonce de la ministre du Travail et de l’Immigration, Mme Jennifer Howard, qui nous apprenait que le salaire minimum augmenterait de 50 cents l’heure le 1er octobre 2010. Toutefois, mis à part les déclarations des bénéficiaires du salaire minimum, du président du Brandon and District Labour Council et, en partie, du président de la Brandon Chamber of Commerce (qui reconnaît qu’une augmentation des revenus des petits salariés profitera aux employés et à l’économie locale), de nombreux commentaires et arguments à ce sujet sont inexacts, trompeurs et incomplets.

L’article du Sun sur l’augmentation de 50 cents (Minimum wage rises 50 cents, 9 avril) affirmait que les employés à plein temps rémunérés au salaire minimum verraient leur revenu brut augmenter de 1 040 $ par année (passant de 18 720 $ à 19 760 $, soit une augmentation de 5,6 %). Cette augmentation « se traduira par une augmentation d’environ 720 $ de la somme qu’ils rapportent chez eux, étant donné que les 320 $ qui restent iront aux gouvernements fédéral et provincial, sous forme d’impôts et de contributions au Régime de Pensions du Canada (RPC) et à l’Assurance-Emploi (AE). » (Les lecteurs du Sun aimeraient peut-être savoir que, même à 9,50 $, le salaire minimum est encore bien insuffisant pour vivre. Deux parents qui ont deux enfants devraient gagner chacun 11,10 $ l’heure pour vivre à Brandon, et une personne monoparentale qui a deux enfants devrait gagner 18,31 $ l’heure.)

Dans un éditorial publié le même jour (Business hit hard), le Sun condamnait à la fois l’augmentation du salaire minimum et « l’embauche de cinq agents de santé et sécurité au travail pour la prévention des accidents et des problèmes de santé sur les lieux de travail », concluant que ces mesures allaient « diminuer la force motrice de la création d’emplois... et rendre le secteur privé beaucoup moins concurrentiel à long terme. Un deuxième éditorial publié le 10 avril (Basic exemption must rise) proposait une alternative à l’augmentation du salaire minimum, soit l’augmentation du montant d’exemption de base pour l’impôt des particuliers de 8 134 $ qu’il est au Manitoba, au montant de la Saskatchewan qui est de 13 348 $. Selon l’auteur de l’éditorial, « cela pourrait faire épargner aux Manitobains la somme de 540 $ en impôts chaque année ».

C’est, bien sûr, la même idée que rabâche la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, la Canadian Taxpayers Association, etc. depuis des années. Ce n’est pas une bonne idée. En fait, c’est une bien mauvaise idée.

Ceux qui gagnent le salaire minimum savent bien qu’une augmentation de leur part de 720 $ est supérieure à l’épargne de 540 $ qu’ils pourraient réaliser avec une augmentation proposée du montant de base pour l’exemption d’impôt. La plupart d’entre eux savent également que même s’ils paient plus en contributions de RPC et d’AE, leurs prestations d’AE seront plus élevées s’ils viennent à perdre leur emploi, et qu’il en sera éventuellement de même pour leur chèque du RPC. De même, les personnes qui gagnent le salaire minimum et même celles qui gagnent plus que le salaire minimum comprennent que leurs impôts défraient les coûts de programmes qui sont bons pour eux comme les soins de santé, l’éducation, les services à l’enfant et à la famille, le système de justice, les garderies, les loisirs et le transport en commun.

En outre, l’auteur de l’éditorial propose d’appliquer cette augmentation du montant de base pour l’exemption d’impôt à tous les Manitobains et Manitobaines. Il ne nous dit pas combien une telle mesure coûterait. Il y a quelques mois, j’ai réfléchi à la question (Increasing the Minimum Wage vs. Income Tax Exemptions, CCPA, 12 juin 2009) et je suis arrivé à la conclusion qu’une augmentation de 1 000 $ du montant de base représenterait une diminution de revenus provenant de l’impôt des particuliers de 72 millions de dollars. « Sur ces 72 millions de dollars, 26,4 % (19 millions) iraient aux particuliers dont le revenu est inférieur à 25 000 $, 46,7 % à ceux dont le revenu est de 25 000 $ à 50 000 $, et 26,9 % (19 millions) à ceux dont le revenu est supérieur à 50 000 $ ».

Mais les éditorialistes du Sun ne songent pas à une augmentation de seulement 1 000 $ du montant de base. Au contraire, ils veulent une augmentation de 5 214 $. La question se pose, naturellement, à savoir combien cela nous coûterait en revenus d’impôts. La réponse est 375 millions de dollars plus ou moins quelques dollars. Les éditorialistes ne nous disent pas comment le gouvernement pourrait compenser une telle perte de revenus. Toutefois, je devine par l’orientation générale de leurs récentes attaques contre le secteur public qu’ils seraient en faveur de coupures dans les services, ce qui aurait des répercussions néfastes sur la plupart des salariés, en particulier les petits salariés, ceux qui ont un revenu fixe et les personnes à la retraite qui dépendent d’une modeste pension.

Avec ce genre d’amis, les Manitobains et Manitobaines à revenu faible ou modeste n’ont certes pas besoin d’ennemis.

En conclusion, l’augmentation de 50 cents du salaire minimum profitera aux petits salariés et à leur famille, et profitera également à tous et chacun d’entre nous en exerçant une bonne influence sur l’économie et en réduisant les dépenses du réseau de la santé, du système de justice et d’autres services liés au faible revenu et à la pauvreté. Cette augmentation améliorera non seulement la qualité de la société manitobaine, mais également l’économie du Manitoba qui sera plus robuste et plus concurrentielle à court et à long terme.

Errol Black est conseiller à la ville de Brandon et membre du conseil d’administration du CCPA — Manitoba.

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