Introduction

Cette année marque la fin des cinq premières années du Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien du gouvernement fédéral. En transférant des fonds aux provinces et aux territoires, et conformément aux plans d’action bilatéraux négociés en matière de garde d’enfants, le gouvernement fédéral a transformé un système d’apprentissage et de garde des jeunes enfants principalement financé par le secteur privé en un système principalement financé par le secteur public.

Les frais d’inscription aux services reconnus dans le cadre du programme sont réglementés dans toutes les juridictions. Six provinces et territoires (Terre-Neuve-et-Labrador, Île-du-Prince-Édouard, Québec, Nunavut, Manitoba et Saskatchewan) ont mis en place des mesures visant à limiter les frais quotidiens moyens des parents à 10 $ ou moins pour l’accès aux programmes reconnus financés par l’État.1Bien que les gouvernements des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon aient mis en place des mécanismes visant à réduire les frais payés par les parents à une moyenne de 10 dollars par jour après avoir adhéré au programme pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants en 2021, ces gouvernements ont autorisé les exploitants à augmenter les frais qu’ils facturent, ce qui fait que les parents paient en moyenne plus de 10 dollars par jour. Cette nouvelle approche du financement de l’éducation préscolaire et des services de garde est un objectif de longue date pour le mouvement canadien de promotion des services de garde d’enfants. Elle permet de poser les bases d’un système de garde de haute qualité, inclusif et universellement accessible, qui est également conçu pour respecter et promouvoir les droits des enfants, des familles et des communautés autochtones.

Toutefois, la réalisation de cet objectif dépend de la décision de tous les paliers de gouvernement de prendre les mesures suivantes : financer les services de garde de manière suffisante et appropriée; accélérer l’expansion des services de garde publics sans but lucratif grâce à une planification publique adéquate et à un effort et une coordination de toutes les administrations gouvernementales; et élaborer et mettre en œuvre des stratégies globales pour développer une main-d’œuvre qualifiée dans le domaine de l’éducation préscolaire et de la garde d’enfants.

Vue d’ensemble

Les engagements fédéraux de 2021 à 2025

Le budget 2021 du Canada vise à ce que « toutes les familles aient accès à un apprentissage et à des services de garde des jeunes enfants qui soient souples, abordables et de haute qualité, où qu’elles vivent » en mettant en place un programme pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, désormais appelé le programme à 10 $ par jour. L’engagement fédéral en matière de garde d’enfants comprenait également la mise en œuvre du Cadre d’apprentissage et de garde des jeunes enfants autochtones, un cadre fondé sur les distinctions qui a été élaboré conjointement par le gouvernement du Canada et ses partenaires autochtones en 2018, afin d’assurer la progression « vers un système d’apprentissage et de garde des jeunes enfants qui répond aux besoins des familles autochtones, peu importe où elles vivent ».

Selon le budget 2021, le développement du système commencerait par les mesures suivantes :

  • jusqu’à 27,2 milliards de dollars de transferts aux gouvernements des provinces et territoires pour ramener les frais de garde à une moyenne de 10 $ par jour d’ici le 31 mars 2026, pour toutes les places en garderie réglementée; pour financer la croissance annuelle continue des programmes de garde sans but lucratif; et pour valoriser correctement le travail des éducatrices et éducateurs de la petite enfance et leur offrir des possibilités de formation et de perfectionnement;
  • un investissement fédéral d’un peu moins de 2,6 milliards de dollars sur cinq ans dans l’éducation préscolaire et la garde d’enfants autochtones, par le biais d’accords financiers avec les gouvernements et les instances autochtones;
  • l’engagement de procéder à un transfert fédéral annuel minimum de 9,2 milliards de dollars pour l’apprentissage et la garde des jeunes enfants au-delà de 2025-2026.

L’année suivante, le budget 2022 a ajouté 625 millions de dollars (sur quatre ans à partir de 2023-2024) aux transferts aux provinces et aux territoires pour soutenir le financement des infrastructures d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, y compris la construction de nouvelles installations. Deux ans plus tard, le budget 2024 a annoncé la création du Programme de prêts pour l’expansion des services de garde d’enfants, administré par la Société canadienne d’hypothèques et de logement. Ce programme fournira des prêts à faible coût et certaines contributions non remboursables aux fournisseurs de services de garde d’enfants publics sans but lucratif qui souhaitent créer davantage de places en garderie ou rénover les centres existants. Ce programme de prêts n’a pas encore été lancé.

Les problèmes de qualité, de quantité et d’accès inéquitable doivent être résolus

Ces investissements fédéraux, bien qu’historiques, restent insuffisants face aux coûts réels et croissants qu’il faut assumer pour que tous les enfants aient accès à des services d’éducation préscolaire et de garde de qualité.

Il faudrait un financement public plus important et des politiques gouvernementales en matière de ressources humaines pour augmenter les salaires des personnes qui travaillent dans le système pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, et pour leur donner accès à des avantages sociaux ainsi qu’à une pension de la fonction publique. Si sept provinces et territoires2Le gouvernement du Manitoba a élaboré des directives salariales pour les établissements d’éducation préscolaire et de garde d’enfants reconnus et financés par le gouvernement. Ces directives recommandent un salaire horaire « cible » pour chaque poste ou classification. Le gouvernement finance les programmes reconnus au moyen d’un supplément qui doit être utilisé pour aider à payer le personnel au salaire horaire « cible ». ont mis en place une grille salariale qui fixe les taux de rémunération des employés du secteur, les niveaux de rémunération restent insuffisants pour encourager la formation et la rétention d’une main-d’œuvre plus qualifiée, sauf à l’Île-du-Prince-Édouard3Kathleen Flanagan and Associates, Final Report: Early Learning and Child Care Recruitment and Retention: PEI’s 2024 Director and Staff Surveys, Early Childhood Development Association of PEI, janvier 2025, https://mcusercontent.com/aff981eb17e452f90e6094988/files/50178ef2-2c85-9175-8afd-59f7f42ff215/2024_ELCC_Director_and_Staff_Survey_Final_Report.pdf..

Pour soutenir la création de services de garde d’enfants publics sans but lucratif, il faut un financement plus important, une meilleure planification gouvernementale et un leadership actif. À présent que les services de garde d’enfants sont principalement financés par l’État, les gouvernements ont le devoir de mettre en place des infrastructures et des programmes de garde d’enfants d’une manière qui garantisse un accès équitable pour tous les enfants et leurs familles. Les décisions relatives à l’emplacement, à la superficie, aux types de nouveaux programmes, à la qualité de la conception et de la construction, ainsi qu’à la dotation en personnel doivent être prises dans l’intérêt public—et non en fonction d’intérêts privés. Elles ne doivent pas non plus être dictées par la capacité des prestataires à développer et à gérer de nouveaux services.

Le gouvernement fédéral doit agir de toute urgence pour mettre un terme à la croissance des services de garde d’enfants à but lucratif bénéficiant de financement public. Depuis le démarrage en 2022 du Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien, 57 % des nouvelles places nettes en garderie reconnue financées par le gouvernement fédéral sont exploitées par des entreprises à but lucratif. Les nouvelles places nettes sans but lucratif ne représentent que 30 % de cette croissance financée par l’État4David Macdonald, Cash cow: Assessing child care space creation progress, Centre canadien de politiques alternatives, août 2025, https://www.policyalternatives.ca/news-research/cash-cow-assessing-child-care-space-creation-progress/..

Il faut élargir le champ d’action des investissements du gouvernement fédéral dans le domaine de la garde d’enfants. Jusqu’à présent, le financement fédéral a été exclusivement consacré aux services de garde d’enfants de moins de six ans, alors que le budget 2021 prévoyait le développement des programmes destinés aux enfants d’âge scolaire. Les données de 2019 (année de référence pour le programme à 10 $ par jour) à 2024 inclusivement montrent qu’en dépit d’une augmentation considérable du nombre de places avant et après l’école pour les enfants de 4 à 12 ans, la plupart des parents qui utilisent ces services continuent de payer des frais élevés et la pénurie de places persiste5Friendly, Martha et al., Interim Space Statistics 2024: Early Childhood Education and Care in Canada, Childcare Resource and Research Unit, juillet 2025..

La rentabilité des investissements fédéraux dans la garde d’enfants passe par de nouvelles Mesures

En 2024, dans son analyse des avantages économiques globaux des premières années du Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien, l’économiste Jim Stanford a constaté que depuis 2019, le secteur de la garde d’enfants avait créé 40 000 emplois, ce qui en fait la sixième source la plus importante de nouveaux emplois au Canada. Le Plan a également soutenu une augmentation significative de la participation des femmes au marché du travail, avec 110 000 travailleuses supplémentaires. Stanford a également calculé que l’expansion des services de garde d’enfants reconnus par le biais du Plan avait ajouté 32 milliards de dollars au PIB6Jim Stanford, Powering Growth: Economic Benefits from Canada’s $10-per-day Early Learning and Child Care Program, Centre For Future Work, November 2024, https://centreforfuturework.ca/wp-content/uploads/2024/11/Child-Care-Economic-Benefits-Nov2024-FINAL.pdf..

Pour que ces avantages économiques se concrétisent, il faut que le Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien continue de se développer pour inclure tous les enfants et s’étendre à toutes les communautés. Le retour sur l’investissement public sera également plus important à court et à long terme si les fonds sont principalement dirigés vers des programmes publics de garde d’enfants sans but lucratif qui consacrent l’intégralité de leurs revenus à la prestation de services, qui paient mieux leur personnel, sont mandatés pour servir tous les enfants et toutes les familles et ne sont pas autorisés à fermer pour pouvoir profiter de leurs actifs financés par l’État.

Mesures

Le BFA prendra les mesures suivantes au cours des cinq prochaines années, afin d’accroître l’accès équitable aux services de garde d’enfants à 10 $ par jour et d’améliorer la qualité du système pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants. En outre, le BFA assurera un soutien financier adéquat pour la mise en œuvre du Cadre d’apprentissage et de garde des jeunes enfants autochtones, élaboré conjointement par le gouvernement du Canada et ses partenaires autochtones.

Le BFA soutiendra, au cours des cinq prochaines années, la création d’un nombre suffisant de nouvelles places nettes à temps plein gérées par des prestataires de services de garde d’enfants communautaires sans but lucratif, des entités du secteur public ou des gouvernements et organisations autochtones, afin garantir qu’il y ait, d’ici le 31 mars 2031, suffisamment de services reconnus dans chaque province et territoire pour accueillir au moins 65 % des enfants de moins de 6 ans.

Le BFA exigera que chaque gouvernement provincial et territorial élabore et dirige un plan d’expansion quinquennal, avec des objectifs de croissance annuelle et des stratégies spécifiques pour augmenter l’offre de services de garde publics et autochtones sans but lucratif et atteindre l’objectif de couverture de 65 %.

Le BFA exigera de chaque gouvernement provincial et territorial qu’il augmente son effectif de personnel de garde, qu’il accroisse les taux de recrutement et de rétention et qu’il augmente la proportion de personnel titulaire d’un diplôme d’études postsecondaires en éducation de la petite enfance. Des fonds fédéraux seront alloués aux mesures suivantes :

  • la rémunération des personnes travaillant dans des services de garde reconnus, suivant un barème salarial régulièrement amélioré dans lequel toutes les heures travaillées sont rémunérées, y compris le temps de préparation des programmes, et qui tient compte des responsabilités, des qualifications et de l’expérience professionnelle;
  • l’élargissement des régimes de prestations et de pensions au secteur de la garde d’enfants, au même titre que les secteurs financés publiquement, tels que l’éducation, la santé et les services municipaux.

Le BFA modifiera le Programme de prêts pour l’expansion des services de garde d’enfants (annoncé en 2024, mais non encore opérationnel) afin d’y ajouter un programme complet d’infrastructure qui fournira des subventions pour soutenir une expansion efficace et efficiente des services de garde publics et autochtones sans but lucratif dans le cadre du Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien.

Le BFA installera des services de garde d’enfants reconnus dans les projets de logement soutenus par le gouvernement fédéral.

Le BFA organisera et soutiendra l’élaboration d’une stratégie globale pour mettre en place un système public de garde d’enfants d’âge scolaire pour les 12 ans et moins d’ici le 31 mars 2027. Cette initiative politique comprendra des consultations approfondies avec les prestataires communautaires de services d’apprentissage et de garde de jeunes enfants, les commissions scolaires publiques et les municipalités.

Le BFA développera, financera et déploiera une stratégie globale de recherche et de collecte de données sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants à l’échelle du Canada. Cette stratégie permettra de suivre les progrès accomplis et de rendre compte de l’utilisation des fonds publics, mais aussi de pour soutenir l’élaboration des politiques.

Le BFA financera un programme de recherche sur l’apprentissage et la garde de jeunes enfants afin de répondre aux principales questions de recherche et d’évaluer les effets des changements apportés aux politiques et aux programmes.

Le BFA exigera que chaque gouvernement provincial et territorial participant au Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien publie chaque année un rapport public complet sur la mise en œuvre de son plan d’expansion et de sa stratégie en matière de main-d’œuvre.

Le BFA exigera du gouvernement fédéral qu’il produise un rapport public annuel sur l’avancement de tous les éléments du Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien.