Introduction
L’insécurité alimentaire existe à la fois au niveau des ménages et des collectivités. On parle d’insécurité alimentaire des ménages lorsque l’accès à la nourriture est insuffisant en raison de contraintes financières1Tim Li, Andrée-Anne Fafard St-Germain et Valerie Tarasuk, Household Food Insecurity in Canada, PROOF, 2022, https://proof.utoronto.ca/wp-content/uploads/2023/11/Household-Food-Insecurity-in-Canada-2022-PROOF.pdf., et d’insécurité alimentaire communautaire lorsque la communauté n’est pas en mesure d’accéder durablement à des aliments culturellement appropriés, ni de les produire, en raison d’obstacles systémiques2Christina Peterson, Ruben Ortiz et Louis Rocconi, « Community food security: The multi-level association between social capital, economic capital, and diet quality », International Journal of Community Well-Being, 7 juin 2022.. Ces deux formes d’insécurité alimentaire sont étroitement liées et il est donc essentiel de les combattre simultanément pour garantir une sécurité alimentaire durable et équitable3B. James Deaton et Alexander Scholz, « Food security, food insecurity, and Canada’s national food policy: Meaning, measures, and assessment », Outlook on Agriculture, 1er septembre 2022..
En 2024, près de 10 millions de personnes, dont 2,5 millions d’enfants, ont été touchées par l’insécurité alimentaire dans les dix provinces canadiennes4Statistique Canada, Enquête canadienne sur le revenu, 2023, 1er mai 2025, https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/250501/dq250501b-fra.htm.. Il s’agit du chiffre le plus élevé jamais enregistré, qui représente une augmentation de 15 % par rapport à l’année précédente. Ce chiffre sous-estime probablement l’ampleur de la crise, car il exclut les personnes vivant dans les territoires, les réserves, les institutions ou les communautés éloignées, ainsi que les personnes sans domicile fixe—autant de groupes qui sont davantage susceptibles de se retrouver en situation de précarité alimentaire5Research to Identify Policy Options to Reduce Food Insecurity, Food insecurity: A problem of inadequate income, not solved by food, PROOF, 2022, https://proof.utoronto.ca/resource/food-insecurity-a-problem-of-inadequate-income-not-solved-by-food/.. L’insécurité alimentaire des ménages est due à l’insuffisance des revenus, causée par les inégalités économiques, le coût élevé de la vie, la stagnation des salaires, la précarité de l’emploi et l’insuffisance des mesures de soutien6Ibid.; voir également Sharanjit Uppal, « L’insécurité alimentaire chez les familles canadiennes », Regards sur la société canadienne, no 2023001, Statistique Canada, 14 novembre 2023, https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/75-006-x/2023001/article/00013-fra.htm..
L’insécurité alimentaire communautaire est également répandue dans tout le pays, notamment dans les communautés rurales, isolées, nordiques, autochtones, noires et racisées. Elle se manifeste par la pauvreté, la précarité du logement, le chômage, l’inabordabilité des produits de première nécessité, un accès limité à la nourriture et le recours aux banques alimentaires7Christina Peterson, Ruben Ortiz et Louis Rocconi, « Community food security: The multi-level association between social capital, economic capital, and diet quality », International Journal of Community Well-Being, 7 juin 2022.; B. James Deaton et Alexander Scholz, « Food security, food insecurity, and Canada’s national food policy: Meaning, measures, and assessment », Outlook on Agriculture, 1er septembre 2022.. Elle est causée par des conditions systémiques telles que l’héritage colonial, les inégalités structurelles, la dépossession des terres et la concentration des entreprises8Amanpreet Malli, Hannah Monteith, Emily C. Hiscock, Erin V. Smith, Kristen Fairman, Tracey Galloway, et al., « Impacts of Colonization on Indigenous Food Systems in Canada and the United States: A Scoping Review », BMC Public Health, 26 octobre 2023; voir également Black Food Sovereignty Working Group et Omar Elsharkawy (Réseau pour une alimentation durable), Food Sovereignty for Black Communities in Toronto: Challenges and Policy Opportunities, 2023, Afri-Can Food Basket, 2023, https://www.bfstoronto.ca/_files/ugd/4965b4_3f7b1de23e624cc7955a98b7c0b7f2c3.pdf..
Avec de la volonté politique, il est possible de résoudre le problème de l’insécurité alimentaire au Canada. Des politiques fondées sur des données probantes pourraient permettre de réduire l’insécurité alimentaire en reconnaissant l’alimentation comme un droit fondamental, en augmentant les revenus, en limitant les profits des entreprises et en soutenant la souveraineté alimentaire des populations autochtones et noires.
Vue d’ensemble
Les politiques proposées dans ce BFA s’appuient sur les cinq idées clés suivantes.
1. L’insécurité alimentaire a un impact sur tous les aspects de la vie
L’insécurité alimentaire a des répercussions sur la santé, le développement de l’enfant, les relations interpersonnelles, l’emploi et la dignité. Les gens sautent souvent des repas pour pouvoir payer leur loyer, leurs factures ou leurs médicaments. Cette forme de précarité renforce la négation des droits fondamentaux dont elle est la conséquence. Elle aggrave la pauvreté, a des répercussions sur les résultats en matière d’éducation et d’emploi, et met à rude épreuve notre système de santé.
- L’insécurité alimentaire entraîne davantage de problèmes de santé et un recours accru aux soins de santé9PROOF, What are the implications of food insecurity for health and health care?, s.d., consulté le 20 juin 2025, https://proof.utoronto.ca/food-insecurity/what-are-the-implications-of-food-insecurity-for-health-and-health-care/..
- Même s’ils ne souffrent pas de la faim eux-mêmes, les enfants de ces ménages ont une moins bonne santé mentale10Ibid..
- Les personnes vivant dans des ménages en situation de précarité alimentaire renoncent souvent à des médicaments sur ordonnance en raison de leur coût : près de la moitié d’entre elles souffrent d’insécurité alimentaire11Ibid..
- L’insécurité alimentaire et l’inabordabilité du logement sont étroitement liées. Trois locataires sur dix et un emprunteur hypothécaire sur six sont concernés12Tim Li, Andrée-Anne Fafard St-Germain et Valerie Tarasuk, Household Food Insecurity in Canada, PROOF, 2022, https://proof.utoronto.ca/wp-content/uploads/2023/11/Household-Food-Insecurity-in-Canada-2022-PROOF.pdf..
- Dans l’ensemble, l’insécurité alimentaire contribue à l’anxiété, à la dépression et à l’isolement social13Centres communautaires d’alimentation du Canada, Sonner l’alarme quant à la nécessité d’investir dans les adultes célibataires en âge de travailler, juin 2023, https://cfccanada.ca/CFCC/media/assets/CFCC-SoundingTheAlarm.pdf..
2. L’insécurité alimentaire des ménages est un problème de revenu
L’insuffisance des revenus est l’un des principaux facteurs de l’insécurité alimentaire. Les revenus issus de l’emploi ne suivent pas le rythme de l’augmentation du coût de la vie. Le coût du logement et les taux d’intérêt pèsent également sur le budget des ménages. Les emplois précaires, plus fréquents dans les communautés racisées et chez les nouveaux arrivants, sont en augmentation14Bryan May, Emploi précaire : Comprendre l’évolution de la nature du travail au Canada, Rapport du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées, juin 2019, https://www.ourcommons.ca/Content/Committee/421/HUMA/Reports/RP10553151/humarp19/humarp19-f.pdf..
Le revenu du travail à lui seul ne permet pas de subvenir aux besoins de base, et les soutiens publics ne permettent pas de combler le manque, laissant des millions de personnes dans une situation de vulnérabilité15Inez Hillel, Holes in the Social Safety Net: Poverty, Inequality and Social Assistance in Canada, Centre d’étude des niveaux de vie, août 2020, https://www.csls.ca/reports/csls2020-06.pdf.. C’est ce qui explique les faits suivants :
- Trois ménages sur cinq en situation de précarité alimentaire dépendent d’un revenu d’emploi (y compris d’un travail indépendant)16Tim Li, Andrée-Anne Fafard St-Germain et Valerie Tarasuk, Household Food Insecurity in Canada, PROOF, 2022, https://proof.utoronto.ca/wp-content/uploads/2023/11/Household-Food-Insecurity-in-Canada-2022-PROOF.pdf.. Les ménages pauvres qui travaillent sont deux fois plus nombreux chez les Autochtones, les Noirs et les personnes racisées17Agence de la santé publique du Canada. Les principales inégalités en santé au Canada : un portrait national, 2018, https://www.canada.ca/content/dam/phac-aspc/documents/services/publications/science-research-data/11.WorkingPoor-FR_final.pdf..
- Soixante-dix pour cent des ménages bénéficiant de l’aide sociale sont en situation de précarité alimentaire18Tim Li, Andrée-Anne Fafard St-Germain et Valerie Tarasuk, Household Food Insecurity in Canada, PROOF, 2022, https://proof.utoronto.ca/wp-content/uploads/2023/11/Household-Food-Insecurity-in-Canada-2022-PROOF.pdf..
- Un adulte sur trois (de 18 à 64 ans) vivant seul ou avec des colocataires est en situation de précarité alimentaire19Statistique Canada, Enquête canadienne sur le revenu, 2023, 1er mai 2025, https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/250501/dq250501b-fra.htm..
3. L’insécurité alimentaire est le reflet des inégalités et elle les perpétue
L’insécurité alimentaire n’affecte pas tous les ménages et toutes les communautés de la même manière. Elle est façonnée par le colonialisme, le racisme, le capacitisme et les ratés politiques qui limitent l’accès aux revenus, à la terre, à l’éducation et aux soins de santé20PROOF, Who are most at risk of household food insecurity?, s.d., consulté le 20 juin 2025, https://proof.utoronto.ca/food-insecurity/who-are-most-at-risk-of-household-food-insecurity/.. L’insécurité alimentaire communautaire sape la résilience des communautés en raison de la perte d’infrastructures, de la faiblesse des investissements, de la dépossession des terres et de politiques favorisant les chaînes d’entreprises. De nombreuses communautés n’ont pas accès à une épicerie, à un espace culturel ou à des aliments adaptés à leur culture. Même avec un revenu suffisant, les gens sont confrontés à des prix élevés, à une qualité médiocre ou à des choix limités.
- Près de 40 % des Autochtones vivant hors des réserves font partie d’un ménage en situation de précarité alimentaire21Statistique Canada, Enquête canadienne sur le revenu, 2023, 1er mai 2025, https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/250501/dq250501b-fra.htm.. Le taux est plus élevé dans les réserves22Malek Batal, Hing Man Chan, Karen Fediuk, Amy Ing, Peter R. Berti, Genevieve Mercille, Tonio Sadik et Louise Johnson-Down, « First Nations households living on-reserve experience food insecurity: prevalence and predictors among ninety-two First Nations communities across Canada », Canadian Journal of Public Health, 28 juin 2021..
- Quelque 32 % des personnes racisées et 47 % des Noirs vivent dans un ménage en situation de précarité alimentaire23Statistique Canada, Enquête canadienne sur le revenu, 2023..
- Les personnes handicapées sont deux fois plus susceptibles de se trouver en situation de précarité alimentaire24Shikha Gupta, Daphne Fernandes, Nicole Aitken et Lawson Greenberg, « Insécurité alimentaire du ménage chez les personnes ayant une incapacité au Canada : résultats de l’Enquête canadienne sur le revenu de 2021 », Rapports sur la santé, Statistique Canada, 21 août 2024, https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/82-003-x/2024008/article/00002-eng.htm..
- Les ménages dirigés par des Autochtones, des Noirs, des personnes racisées ou des personnes handicapées sont confrontés à une insécurité alimentaire plus grave, même s’ils disposent d’un revenu supérieur au seuil de pauvreté25Sharanjit Uppal, « L’insécurité alimentaire chez les familles canadiennes », Regards sur la société canadienne, no 2023001, Statistique Canada, 14 novembre 2023, https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/75-006-x/2023001/article/00013-fra.htm..
4. L’insécurité alimentaire communautaire est due au contrôle des entreprises
Le système alimentaire canadien est dominé par une poignée d’entreprises puissantes26Kody Blois, Un appel à l’action : Comment le gouvernement et l’industrie peuvent lutter contre la volatilité des prix alimentaires, Rapport du Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, mai 2024, https://publications.gc.ca/collections/collection_2024/parl/xc12-1/XC12-1-1-441-18-fra.pdf.. Leurs pratiques commerciales, axées sur le profit, entraînent une augmentation des coûts, limitent la concurrence et concentrent les pouvoirs. Elles évincent ainsi les plus petits acteurs, limitent les économies alimentaires locales, la démocratie dans le système alimentaire et le choix des consommateurs. Elles affaiblissent la souveraineté alimentaire des communautés et réduisent l’accès à la nourriture dans des régions entières, en particulier dans les zones rurales et nordiques27James Hannay, An Inclusive Farm Economy Is the Antidote to Corporate Concentration, Centre canadien de politiques alternatives, 6 janvier 2025, https://www.policyalternatives.ca/news-research/an-inclusive-farm-economy-is-the-antidote-to-corporate-concentration/..
- Les agriculteurs sont confrontés à une hausse du coût des intrants et à une concentration des acheteurs, ce qui entraîne une diminution des alternatives agricoles et une augmentation de l’endettement (voir le chapitre Agriculture).
- Les chocs subis par la chaîne d’approvisionnement sont refilés aux consommateurs au moyen de diverses pratiques de réduflation et de déqualiflation.
5. Dans les communautés autochtones et noires, l’insécurité alimentaire est un problème de système alimentaire
La colonisation a perturbé les systèmes alimentaires autochtones et rompu les liens avec les terres ancestrales28Amanpreet Malli, Hannah Monteith, Emily C. Hiscock, Erin V. Smith, Kristen Fairman, Tracey Galloway et al., « Impacts of Colonization on Indigenous Food Systems in Canada and the United States: A Scoping Review », BMC Public Health, 26 octobre 2023. (voir le chapitre Premières Nations). Les efforts de souveraineté alimentaire des Autochtones se heurtent à des politiques de financement coloniales, à des obstacles réglementaires et à un sous-investissement chronique29Sarah Rotz, Andrée-Anne Xavier et Tasha Robin, « ’It Wasn’t Built for Us’: The Possibility of Indigenous Food Sovereignty in Settler Colonial Food Bureaucracies », Journal of Agriculture, Food Systems, and Community Development, 11 mai 2023.. Des programmes comme Nutrition Nord Canada subventionnent souvent les entreprises de vente au détail au détriment des cultures communautaires30Tracey Galloway et Nancy Li, « Pass-through of Subsidies to Prices under Limited Competition: Evidence from Canada’s Nutrition North Program », Journal of Public Economics, 1er septembre 2023.. En outre, le changement climatique menace les écosystèmes alimentaires31Virginia R. Wyllie de Echeverria et Thomas F. Thornton, « Using Traditional Ecological Knowledge to Understand and Adapt to Climate and Biodiversity Change on the Pacific Coast of North America », Ambio, 1er décembre 2019..
Les communautés noires sont confrontées à un racisme systémique, à des obstacles à l’accès aux terres et au financement, ainsi qu’à une exclusion historique32Black Food Sovereignty Working Group et Omar Elsharkawy (Réseau pour une alimentation durable), Food Sovereignty for Black Communities in Toronto: Challenges and Policy Opportunities, 2023, Afri-Can Food Basket, 2023, https://www.bfstoronto.ca/_files/ugd/4965b4_3f7b1de23e624cc7955a98b7c0b7f2c3.pdf.. Les initiatives des Noirs dans le domaine de l’alimentation sont sous-financées et insuffisamment reconnues33Ibid.. La discrimination en matière de logement, d’emploi et d’éducation aggrave la précarité alimentaire34René Houle, Évolution de la situation économique de la population noire au Canada, 2001 à 2016, Statistique Canada, Série thématique sur l’ethnicité, la langue et l’immigration, 13 août 2020, https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/89-657-x/89-657-x2020001-fra.htm., tandis que le manque de données fondées sur la race limite la mise en place de soutiens ciblés35Maleeka Munroe, « The Need for Race Based Data in Canada », University of Toronto Medical Journal, 9 juillet 2022..
Les communautés autochtones et noires sont résilientes et mènent des actions transformatrices en faveur de la souveraineté alimentaire. Investir dans ces initiatives est essentiel pour favoriser la réconciliation, la justice raciale et le changement systémique.
Mesures
1. Légiférer sur des objectifs nationaux de sécurité alimentaire des ménages
Le BFA adoptera d’ici l’automne 2026 un projet de loi fixant deux objectifs nationaux : réduire l’insécurité alimentaire des ménages de 50 % et éliminer l’insécurité alimentaire grave des ménages d’ici 2030, en prenant 2021 comme année de référence. Ces objectifs sont conformes à la Stratégie canadienne de réduction de la pauvreté ainsi qu’aux objectifs de développement durable des Nations Unies. Leur réalisation permettra de réduire de trois millions le nombre de personnes vivant dans un ménage en situation de précarité alimentaire.
Le BFA mettra en place un groupe de travail fédéral temporaire composé d’experts du secteur et de personnes ayant une expérience vécue, qui sera chargé de recommander des mesures pour atteindre ces objectifs.
Le BFA mesurera les progrès accomplis en utilisant des données ventilées par race, autochtonité, âge, sexe, orientation sexuelle, handicap et situation géographique afin de suivre l’évolution de l’équité (voir les chapitres Équité raciale et Égalité des genres).
2. Renforcer le revenu des ménages tout au long de la vie
Les études montrent que les mesures de soutien du revenu permettent de réduire l’insécurité alimentaire des ménages36PROOF, « What can be done to reduce food insecurity in Canada? », s.d., consulté le 19 décembre 2023, https://proof.utoronto.ca/food-insecurity/what-can-be-done-to-reduce-food-insecurity-in-canada/.. Par exemple :
- L’insécurité alimentaire grave chez les familles avec enfants a diminué après l’augmentation du soutien aux familles bénéficiaires de l’Allocation canadienne pour enfants en 201637Erika Brown et Valerie Tarasuk, « Money speaks: Reductions in Severe Food Insecurity Follow the Canada Child Benefit », Preventive Medicine, 129, 105876, 2019..
- L’insécurité alimentaire des ménages diminue de moitié chez les personnes de 65 ans et plus, vivant seules et à faible revenu, lorsqu’elles commencent à percevoir des prestations de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti38Lynn McIntyre, David J. Dutton, Carol Kwok et J.C. Herbert Emery, « Reduction of Food Insecurity among Low-Income Canadian Seniors as a Likely Impact of a Guaranteed Annual Income », Analyse de politiques, septembre 2016..
S’appuyant sur ces succès, le BFA introduira :
- un supplément de l’Allocation canadienne pour enfants (ACE-Pauvreté) pour 636,000 familles à faible revenu;
- le Revenu de subsistance canadien (RSC) pour 3,6 millions de familles à faible revenu en âge de travailler;
- une bonification du Supplément de revenu garanti pour 2,7 millions de familles âgées à faible revenu;
- une aide ciblée au logement abordable (location et propriété), y compris l’élargissement des prestations relatives au logement du Canada, pour les ménages en situation de précarité du logement, en particulier les Autochtones, les Noirs, les personnes racisées, les travailleuses et travailleurs pauvres, ainsi que les locataires en situation de précarité.
Ces mesures permettront d’augmenter les revenus de millions de personnes, réduisant ainsi la pauvreté et l’insécurité alimentaire des ménages (voir les chapitres Pauvreté et sécurité du revenu, Logement abordable et itinérance, et Assurance-emploi).
L’augmentation du revenu permet également aux gens de participer plus pleinement aux économies alimentaires locales et aux initiatives communautaires, renforçant ainsi la résilience du système alimentaire dans son ensemble.
3. S’attaquer au contrôle des entreprises sur le système alimentaire
Le revenu à lui seul ne suffit pas à résoudre l’insécurité alimentaire communautaire, qui fait que même lorsque les gens ont les moyens de se nourrir, ils se heurtent à des obstacles, car la communauté entière n’a pas accès à une alimentation fiable, abordable et culturellement appropriée, en raison de la monopolisation des marchés et du sous-développement des infrastructures.
Le BFA restreindra les pouvoirs des entreprises, renforcera la réglementation du secteur alimentaire et investira dans les coopératives ainsi que dans les systèmes alimentaires communautaires. Pour mettre en place des systèmes alimentaires communautaires résilients et durables et élargir l’accès équitable à l’alimentation, il prendra les mesures suivantes :
- Introduire une réglementation pour renforcer les pouvoirs du Bureau de la concurrence afin de bloquer les fusions, de collecter des données sur les prix et de démanteler les monopoles, en particulier dans les zones mal desservies.
- Investir 100 millions de dollars sur trois ans dans les détaillants alimentaires locaux, sans but lucratif et coopératifs, ainsi que dans les marchés publics, par le biais de subventions, de prêts et de formations.
- Implanter des épiceries publiques dans les déserts alimentaires urbains, en donnant la priorité à l’approvisionnement local.
- Investir 50 millions de dollars dans la recherche sur le contrôle des entreprises et les alternatives communautaires telles que les centres alimentaires et les politiques d’approvisionnement, en mettant l’accent sur les zones rurales et nordiques.
- Réserver 30 % des fonds du Programme national d’alimentation scolaire du Canada à l’approvisionnement en aliments locaux.
4. Soutenir la souveraineté alimentaire des populations autochtones
La souveraineté alimentaire des populations autochtones requiert une approche à long terme, pilotée par ces populations et ancrée dans la terre, la culture, l’autodétermination et le savoir intergénérationnel.
Le BFA prendra les mesures suivantes :
- Engager 50 millions de dollars pour mettre en œuvre complète de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP) dans son intégralité, et élaborer conjointement une loi sur la souveraineté alimentaire autochtone qui affirme la compétence des peuples autochtones sur les systèmes alimentaires au moyen de l’accès à la terre, aux ressources et aux stratégies de résistance au climat.
- Fournir 200 millions de dollars sur 10 ans pour financer de manière illimitée le travail de souveraineté alimentaire basé sur la terre et aligné sur les cycles et les modes de gouvernance autochtones.
- Investir 100 millions de dollars sur cinq ans dans des postes permanents et rémunérés, en lien avec la terre, tels que les chasseurs, les cueilleurs et les gardiens du savoir.
- Allouer 50 millions de dollars sur cinq ans pour réformer la réglementation en matière de sécurité alimentaire et soutenir les pratiques traditionnelles.
- Respecter le principe du consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause en associant la gouvernance autochtone aux décisions relatives à l’alimentation, à la terre et à la culture.
5. Soutenir la souveraineté alimentaire des personnes noires
Pour garantir la souveraineté alimentaire des personnes noires, il est nécessaire de réaliser des investissements soutenus, de leur donner accès à la terre et de reconnaître les solutions qu’elles proposent et qui sont fondées sur l’entraide, la propriété et la résilience culturelle.
Le BFA prendra les mesures suivantes :
- Financer à hauteur de 50 millions de dollars l’élaboration d’une stratégie nationale de souveraineté alimentaire pour les personnes noires, en collaboration avec des organisations dirigées par des personnes noires, afin de soutenir l’accès à la terre, les infrastructures alimentaires et les systèmes ancrés dans la culture des communautés noires.
- Investir 200 millions de dollars sur 10 ans sous forme de financements non affectés pour renforcer les systèmes alimentaires dirigés par des personnes noires.
- Engager 200 millions de dollars sur cinq ans pour soutenir l’accès équitable des agriculteurs noirs à la terre.
- Allouer 100 millions de dollars sur cinq ans pour renforcer les infrastructures alimentaires dirigées par des personnes noires par l’intermédiaire du Fonds des infrastructures alimentaires locales.
- Investir 50 millions de dollars sur cinq ans dans la recherche sur la sécurité et la souveraineté alimentaires des personnes noires, un domaine qui est souvent sous-financé malgré une forte innovation de la part de la communauté.
- Rendre obligatoire la collecte de données fondées sur la race concernant l’accès à la terre, l’agriculture et l’insécurité alimentaire afin d’éclairer les politiques.


